Peindre ?
Comment être peintre en 2020 ? Comme en 2011 ou 1995, sans doute, et comme pendant toutes ces années passées à essayer de faire cracher à ce vieux médium quelque vérité enfouie dans la pâte.
J’ai commencé à peindre parce qu’il n’y avait pas moyen d’y échapper, fasciné depuis l’enfance par ce moyen de dire les choses autrement qu’avec des mots et des sons, par la couleur et le trait, écriture du début du monde.
Au début, il y a eu la touche de Richard Heintz, peintre presque oublié (pourtant dans quelques musées Belges). Ce peintre avait une façon étonnante de poser sa peinture sur la toile , et j’ai eu la chance de fréquenter assidûment un de ses tableaux dans mon enfance. Cette touche si expressive m’a marqué jusqu’à aujourd’hui et c’est grâce à cela (… ou à cause de cela… ), entre autre, que je suis devenu un peintre.
J’appris plus tard que ce tableau n’avait pas croisé ma route par hasard et que mon grand père ( que je n’ai pas connu) était témoin au mariage de Richard Heintz.
Ensuite, à l’adolescence, je fus attiré par les peintures abstraites et j’ai gardé longtemps dans ma chambre d’étudiant une affiche ( glanée à Bruxelles, encore la Belgique…) d’un peintre japonais « Gutaï » dont l’expressivité de la facture, curieusement, pouvait rappeler la fameuse « touche » de Richard Heintz.
J’ai commencé à peindre au lycée et c’est par la transparence et la légèreté de l’aquarelle que je débutai, mettant de côté pendant un temps mes envies de matières fortes et parlantes. J’aime toujours le papier et la subtilité de l’aquarelle et son côté « simple » que l’on retrouve dans la technique de l’encaustique (chimie et mise en œuvre simple).
J’ai commencé une « carrière » de peintre à une époque ou la peinture (et encore plus la peinture « abstraite ») n’avait déjà plus la cote dans l’institution et les choses ne se sont pas arrangées par la suite. En ce début du troisième millénaire, après trente et quelques années de ce « métier », comme beaucoup de mes collègues j’ose à peine dire que je suis peintre de peur de passer pour un néandertalien égaré voire un affreux réactionnaire. Il m’est arrivé de travailler avec des institutions culturelles très sérieuses où l’on me qualifiait de « plasticien » sans jamais faire allusion à la peinture…